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Brevets

Droits Nationaux Antérieurs, ce qui change avec la JUB

[26/07/2023]

Le 1er juin 2023, l’entrée en vigueur de l’Accord relatif à une juridiction unifiée du brevet (Accord JUB) a enfin instauré la juridiction unifiée du brevet (JUB) et le brevet à effet unitaire (BU).

En ce qui concerne les états participants à l’Accord JUB, les déposants doivent à présent choisir s’ils requièrent l’effet unitaire suite à la délivrance d’un brevet européen, ou s’ils restent sur le système classique de validation état par état. Les éléments stratégiques entrant dans ce choix sont nombreux : cout, territoires d’intérêt, traductions, solidité du brevet, etc.

Cependant les déposants ne sont pas toujours conscients d’un autre élément qui pourrait devenir critique dans ce choix : l’éventuelle existence de droits nationaux antérieurs.

Ces derniers sont des demandes de brevet nationales d’états européens, disposant d’une date de priorité antérieure à celle du brevet européen considéré, mais publiées après.

Les droits nationaux antérieurs ne font ainsi partie ni de l’état de la technique selon l’Article 54(2) CBE (puisque publiés après la date de priorité du brevet européen considéré), ni de l’état de la technique selon l’Article 54(3) CBE (puisqu’il ne s’agit pas de demandes européennes), de sorte que l’Office Européen des Brevets (OEB) ne les prend pas en compte lors de l’examen : l’existence d’un droit national antérieur pertinent ne prévient pas la délivrance d’un brevet européen.

En revanche les droits nationaux antérieurs ont des effets à l’échelle nationale, régis par les dispositions législatives nationales.

Par exemple, un droit national antérieur français est opposable à la fraction française d’un brevet européen classique au titre de l’Article L611-11 CPI 3e alinéa.

En pratique, si un droit national antérieur est identifié lors de la procédure de délivrance, il peut être pris en compte en amont en fournissant à l’OEB un jeu de revendications spécifiques pour l’état de ce droit national antérieur, voire en retirant la désignation de cet état. Il est également possible, après délivrance, de procéder à une limitation nationale.

En l’absence d’un jeu de revendications spécifique, les conséquences d’un droit national antérieur qui aurait été négligé sont au pire la nullité de la seule fraction nationale concernée, de sorte qu’aujourd’hui la question des droits nationaux antérieurs est largement ignorée pour les brevets européens classiques.

Toutefois, les choses deviennent bien plus problématiques dans le cas d’un brevet à effet unitaire :

  • Le Règlement (UE) n°1257/2012 mettant en œuvre la coopération renforcée dans le domaine de la création d’une protection unitaire conférée par un brevet, prévoit dans son article 3(1) que « Aucun effet unitaire n’est conféré à un brevet européen qui a été délivré avec des jeux de revendications différentes pour différents États membres participants ».

Ainsi, il n’est pas possible de fournir en amont un jeu de revendications différent pour l’état en question si l’on souhaite l’effet unitaire, et seule une limitation globale serait possible, ce qui réduirait inutilement la portée par rapport à un brevet européen classique.

  • Dans le cas d’un litige devant la JUB portant sur un brevet européen à effet unitaire, l’Article 62(2) de l’Accord JUB prévoit expressément la possibilité d’annuler le brevet sur la base d’un droit national antérieur, et l’article 3(2) de ce règlement n°1257/2012 indique qu’un brevet européen à effet unitaire « ne peut être limité, transféré, ou révoqué ou s’éteindre qu’à l’égard de tous les États membres participants ».

Ainsi, on a le risque de nullité partielle voire totale pour tous les états participants à l’accord JUB, et pas seulement celui du droit national antérieur.

On rappellera que l’OEB signale à titre d’information l’éventuelle existence de droit nationaux antérieurs lors de notification d’intention de délivrance au titre de la règle 71(3) CBE.

Par conséquent, en cas de droit national antérieur signalé, il convient d’étudier celui-ci attentivement si l’effet unitaire était souhaité. Et si ce droit national antérieur s’avérait effectivement pertinent vis-à-vis des revendications du brevet européen, il pourrait être judicieux de renoncer à requérir l’effet unitaire et de plutôt procéder à des validations classiques.

Nos équipes se tiennent à votre disposition pour tout complément d’informations à ce sujet.

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